7 novembre 2013
L’avenir est-il dans le médicament à l’unité ?
Marisol Touraine, Ministre de la Santé a annoncé une période de test sur les médicaments à l’unité. Ce test aura lieu dans certaines régions et débutera par les antibiotiques.
Quels sont les objectifs de ce test ?
- Réduire le déficit de la Sécurité Sociale.
- Réduire la consommation de médicaments. En effet, 1,5kg est le poids de médicaments non utilisés (MNU) par Français. Rares sont ceux qui ne disposent pas d’une armoire à pharmacie.
- Faire face à l’ « antibiorésistance ». Le choix des antibiotiques est crucial car la surconsommation d’antibiotiques a permis aux virus d’être plus résistants aux médicaments et par conséquent exerce l’effet inverse escompté.
- Réduire la pollution des eaux. Les Français ne rapportent pas leurs médicaments en pharmacie, nombreux sont ceux qui déversent les liquides dans les éviers ou les comprimés dans les poubelles. Tous ces médicaments se retrouvent ensuite dans les milieux aquatiques.
Comment cela va fonctionner ?
Le pharmacien délivrera le nombre de comprimés nécessaires au traitement. Si le patient n’est pas totalement guéri, il semblerait qu’il puisse retourner à la pharmacie pour demander un complément sans être obligé de repasser chez le médecin. Ce complément devra être raisonnable : « tant que les quantités restent limitées » –
Nombre de pays proposent déjà ce service depuis de nombreuses années : la Grande-Bretagne, la Nouvelle Zélande, les Etats-Unis, par exemple. Ces derniers ne sont pas une référence en termes de Sécurité Sociale. Ils ont adopté ce système depuis longtemps mais ils sont de très grands consommateurs de médicaments.
En France, cela pose une énorme controverse, les professionnels ne sont pas tous d’accord entre eux et n’y sont pas forcément favorables.
Tout d’abord, les pharmaciens risquent de voir diminuer leurs chiffres d’affaires. Ils ne veulent pas faire la manutention pour déconditionner les plaquettes de médicaments et les mettre dans des emballages unitaires (boîtes).
Les organisations représentatives des pharmaciens n’ont pas toutes la même vision. En effet, d’un côté Gilles Bonnefond, Président de l’USPO (Union des Syndicats de Pharmaciens d’Officine) reproche la non-préparation de cette initiative avec les parties prenantes concernées et ne voit pas comment se passer des indications de la notice comme les contre-indications, les risques de somnolence… Il ne croit pas à l’hypothèse de revenir au vrac avec le risque de perdre en traçabilité.
De l’autre côté, Philippe Gaertner, Président de la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France est plus optimiste sur ce test, notamment sur la possibilité de réduire les effets des antibiotiques, mais il a conscience de la complexité de la vente au détail.
Je n’ai pas trouvé d’articles sur la réaction des laboratoires concernant la mise en place de ce test, mais ils vont inévitablement être impactés directement sur leurs ventes si le système démontre une baisse de la consommation.
Pour le moment, les médecins n’ont pas réagi outre mesure car ils sont les premiers à prescrire les médicaments parfois massivement.
Mais quels sont les risques invoqués pour le patient par ces professionnels ?
- L’hygiène
- La date de péremption
- La traçabilité des produits
L’augmentation des erreurs humaines, mauvaises posologies
Les associations de consommateurs évoquent une diminution des emballages, je ne suis pas sûre que cela soit possible. En effet, les pharmaciens vont déconditionner les emballages des laboratoires pour les mettre dans d’autres conditionnements. Actuellement, les conditionnements se font en blister et étui qui garantissent conservation, sécurité et hygiène.
Le véritable enjeu écologique sera de réduire la présence de médicaments dans les milieux aquatiques. En effet, les Français n’ont toujours pas le réflexe de retourner leurs médicaments non utilisés auprès de leur pharmacien (Cyclamed). Mais ce n’est pas le seul problème, les médicaments se retrouvent dans les urines qui sont également rejetés dans les milieux aquatiques.
Il faut étudier tous les avantages et inconvénients et ne pas croire que cela permettra d’engendrer des gains immédiats et, surtout tenir compte de l’impact sur l’ensemble des parties prenantes et l’environnement. L’avenir nous dira si nous reviendrons à la vente en vrac et peut être reverrons nous apparaître les préparations magistrales.
Sources
http://www.sante.gouv.fr/medicaments,1969.html
Base de Données Publique du Médicament
http://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/
Le Parisien – l’Express